Monoprix : pilotage visuel des rayons avec 12 000 capteurs et planogrammes interactifs

Par Laetitia Lamari et Adrien Naeem

Un déploiement étalé depuis 2022

Depuis 2022, Monoprix a engagé une transformation progressive du pilotage de ses rayons. « Depuis 2022, Monoprix a installé des caméras pour surveiller les ruptures de stock en rayon », résume Laetitia Lamari. Ces petites caméras Captana (VusionGroup) prennent des photos régulières des gondoles et alimentent un suivi en quasi temps réel.

En 2025, l'enseigne a franchi une nouvelle étape en lançant des planogrammes interactifs et des écrans d'animation en magasin. Plus de 12 000 capteurs ont été déployés dans 107 magasins, et l'ordre de suivi porte sur 850 000 références (SKU).

« Plus de douze‑mille capteurs ont été déployés dans cent sept magasins Monoprix et de l'ordre de huit‑cent‑cinquante‑mille références produits… et tout ça, c'est suivi quasiment en temps réel. » — Laetitia Lamari

Objectifs : meilleure disponibilité et animation opérationnelle

Le système vise d'abord à limiter les ruptures en rayon et à améliorer la « détention », c'est‑à‑dire la part des références effectivement présentes en magasin par rapport à l'assortiment souhaité. Sur les deux dernières années, Monoprix affiche un gain de 2,5 points sur ce taux de détention.

La direction opérationnelle a fixé un objectif réseau de 98% de détention (les équipes étaient à 95–96%). Selon les calculs internes, 2 points de détention représentent environ 0,6 point de chiffre d'affaires. Par ailleurs, l'amélioration de la disponibilité a un effet positif sur l'expérience client (NPS) et génère 1 à 2 points de ventes additionnelles.

Du « déclaratif » au pilotage en temps réel

Pour Adrien Naeem, spécialiste de la transformation retail, l'intérêt clef n'est pas seulement technologique mais managérial : « Le pilotage visuel permet de passer du déclaratif à l'animation en temps réel ». Concrètement, les managers disposent désormais d'indicateurs visuels — détention, démarque, tendances de chiffre — présentés sur des écrans adossés aux tableaux Velleda traditionnels.

Ce nouveau format d'animation facilite la priorisation des tâches lors des briefings : le remplissage avant ouverture puis la phase qualitative dans la journée, notamment l'après‑midi, quand 50% du chiffre d'affaires se réalise après 17 heures.

Animation des équipes et escalade vers la supply chain

Le planogramme interactif affiche, pour chaque rayon, des codes couleurs et des listes de « top » et « flop » produits. Cette granularité sert à la fois l'organisation quotidienne (repasser une zone rouge en vert) et la stratégie d'achats : en remontant les incohérences récurrentes, la centrale peut identifier des problèmes d'approvisionnement par famille de produits (flux stocké vs flux tendu).

Les outils permettent aussi d'envisager des dispositifs d'incitation : valoriser le collaborateur qui améliore une zone critique. Pour les opérationnels, l'enjeu est de parler le langage du magasin plutôt que des tableaux Excel : un format visuel et partagé facilite l'adhésion.

Limites et enjeux à venir

Le projet réduit la part du reporting déclaratif, souvent peu fiable (planogrammes non reportés ou faussement marqués OK). Reste à mesurer l'impact long terme sur la satisfaction client et la rentabilité nette après coûts d'équipement et exploitation.

Laetitia Lamari conclut que le dispositif offre aujourd'hui une « vision fiable sur l'application effective des planogrammes », tandis qu'Adrien Naeem insiste sur la nécessaire orchestration entre animation magasin et décisions achats pour transformer les données en gains durables.

Chiffres clés : 12 000 capteurs — 107 magasins — ~850 000 références — gain de 2,5 pts de détention — objectif 98% de détention.