14 décembre 2025

PrestaShop racheté par cyber_Folks et Sylius : quel impact pour l'e‑commerce open source ?

PrestaShop racheté par cyber_Folks et Sylius : quel impact pour l'e‑commerce open source ?

PrestaShop racheté par cyberFolks et Sylius : quel impact pour l'e‑commerce open source ?

Résumé — PrestaShop, la plate‑forme française historique de commerce en ligne, passe sous le contrôle du groupe polonais cyberFolks aux côtés de Sylius. L’opération regroupe environ 230 000 boutiques actives, pour un volume d’affaires estimé à 22 milliards d’euros en 2024 côté PrestaShop, auxquels s’ajoutent près de 7 milliards d’euros provenant des projets Sylius, soit un périmètre cumulé d’environ 35 milliards d’euros de GMV.

Les faits

Fondée en 2007, PrestaShop s’est imposée comme une solution open source majeure pour les TPE et PME. Après son rachat par MBE Worldwide en 2021, l’éditeur change à nouveau de mains : cyberFolks (ex‑R22), groupe polonais d’hébergement et de services cloud coté à la Bourse de Varsovie, intègre désormais PrestaShop à un portefeuille qui comprend déjà des solutions SaaS, des outils d’intégration et de communication.

Aux côtés de cyberFolks, Sylius — framework e‑commerce headless et API‑first d’origine polonaise — complète l’ensemble pour adresser les projets plus complexes et personnalisés. Le nouvel ensemble revendique une stratégie hybride : SaaS, open source et composable.

Réactions d’experts

Laetitia Lamari souligne l’importance du mouvement pour les marchands : « Pour beaucoup, l’écosystème PrestaShop et Sylius adresse une partie du marché non négligeable en termes de nombre de marchands ». Elle rappelle que, pour certains commerçants SMB, PrestaShop reste une solution de référence et que cette opération peut débloquer des opportunités : « peut‑être que cette alliance… ça va débloquer des levels pour certains marchands SMBs. »

Adrien Naeem adopte une lecture plus critique : « Ce n’est pas un CMS, c’est une plateforme e‑commerce », corrige‑t‑il d’abord sur la terminologie technique, puis nuance l’effet attendu : « Je pense qu'on s'en fout complètement, ça ne changera rien… ça prendra des plombes avant qu'il y ait des connexions qui soient propres. » Pour lui, l’opération est surtout symbolique pour la communauté open source : « Pour l'open source, c'est bien, ça bouge un peu », mais elle ne remettra pas en cause le rapport de force face aux acteurs SaaS comme Shopify ou Adobe.

Enjeux stratégiques

cyberFolks mise sur des synergies industrielles : cross‑sell des services d’hébergement, intégrations marketplace/ERP via Apilo et Sellintegro, et renforcement des briques de communication (Vercom). L’objectif affiché est de proposer un écosystème capable d’adresser à la fois les besoins simples des PME (rapide à déployer via SaaS) et les architectures complexes des grands comptes (via Sylius et le composable).

La consolidation vise aussi à récupérer une base installée massive : PrestaShop compte environ 230 000 boutiques actives, un levier commercial et un terrain de monétisation des services associés (hébergement, modules, intégrations).

Limites et perspectives

Adrien met en garde contre l’enthousiasme immédiat des cercles techniques : « Tous ces barbus… vont dire : c'est le truc attendu. Non, on s'en fout, c'est nul, il ne va rien se passer. » Il prédit un déploiement progressif et rappelle l’expérience d’autres intégrations industrielles qui prennent souvent des mois voire des années.

Laetitia nuance en pointant l’impact social et commercial pour les acteurs attachés à PrestaShop : « Le gars était attaché à son PrestaShop… il faisait vraiment des millions. » Pour elle, l’opération peut faciliter des migrations et ouvrir des fonctionnalités (IA, intégrations) qui étaient auparavant plus difficiles pour certains marchands.

Enfin, au‑delà du repositionnement européen, la transaction illustre la recomposition du paysage e‑commerce : des acteurs d’infrastructure cherchent à assembler des offres complémentaires pour rivaliser, non pas seulement sur la technologie, mais sur la chaîne de valeur (services, intégrations, communication).

Conclusion

L’acquisition de PrestaShop par cyberFolks avec Sylius à ses côtés est moins un « big bang » immédiat qu’une tentative de consolidation stratégique : récupérer une large base de marchands, construire des synergies de services et proposer une alternative hybride face aux grands acteurs SaaS. Selon Laetitia Lamari, l’opération peut débloquer des opportunités pour des SMB attachés à PrestaShop ; pour Adrien Naeem, l’impact concret restera limité à court terme et prendra du temps pour se matérialiser. Le vrai défi sera de transformer cette masse critique en trajectoire de montée en gamme et en revenus récurrents.

Contexte chiffré cité : PrestaShop ~230 000 boutiques actives, €22 milliards de GMV (2024); Sylius ~€7 milliards de GMV; ensemble ≈ €35 milliards.